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Les voyages d'Ouralie
3 avril 2014

Presque une île : Rhuys en Morbihan

 

Je voudrais évoquer ici un petit coin de France qui resta mon Eldorado pendant plus de dix ans, et puis le temps a fait son œuvre, et surtout à mesure que décroissait ma peur de l'avion, grandissait ma peur de la route, ses radars, ses abords de villes même moyenne, et les travaux incroyables sur la N79 que je ne reconnaissais plus d'une année sur l'autre.

 

Il s'agissait de rallier depuis Lyon la Presqu'ile de Rhuys, en Bretagne Sud, et ce n'est pas une mince affaire.

 

J'ai connu des intrépides qui faisait le trajet en une journée, moi j'aime prendre mon temps et je faisais toujours une étape à Tours, ou Chateauroux, dans quelque hotel de chaine introuvable, mais en compensation je m'offrais la visite d'un château de la Loire toujours différent – Amboise et le Clos Lucé, Chenonceau, Langeais, Chambord, Azay le Rideau – Mais que de fatigue et de monotonie le long de ces routes du centre de la France !

 

Je guettais le moment où les toits rose cédaient la place aux toits bleus, c'était le principal attrait de tous ces kilomètres laborieux.

 

 

 

Enfin, sortie de Nantes - visitée une seule fois, le soulagement de trouver la belle autoroute gratuite qui traverse la Bretagne, et dont j'ai déjà oublié le numéro.

 

Il me semblait que ça sentait déjà l'océan, a voir les alignements de pin à l'horizon.

 

Et enfin, j'entrais dans la presqu'île, au rond point de Muzillac.

 

Le moment était solennel, je devenais bretonne, citoyenne d'un autre monde dont je rêvais toute l'année !

 

 

 

C'était en grande partie la faute à cette abbaye de Rhuys, dont les bâtiments conventuels, toujours gérés par les sœurs de la Charité, s'étaient transformée en maison de vacance un peu particulière, et qui m'emballa pendant ma période « patrimoine et spiritualité ».

 

100_4239Son domaine s'adossait à l'abbatiale de St Gildas, dont Abélard en exil fut le prieur au 12ème siècle, toute une partie du déambulatoire date d'ailleurs de cette lointaine époque.

 

La presqu’île était alors couverte de forêts giboyeuses, dominée par l'imposant château de Suscinio, qui était la résidence d'été des ducs de Bretagne.

 

Ils sont d'ailleurs pour la plupart inhumés sous la nef, et leurs pierres tombales dressées le long des murs.

 

L'abbaye actuelle a été reconstruite au 17eme siècle sur les ruines du couvent bénédictin attenant, et reprise avant la révolution par les Soeurs de la Charité, à vocation d'éducatrices, donc, non contemplatives.

 

Elles sont maintenant dans le tourisme, et pendant tous ces étés, j'ai pu voir les changements effectués dans les quatre bâtiments disséminés au cœur d'un parc ombragé : chambres rénovées, accessibilité, espaces de réunions.

 

Depuis la place du marché devant l'abbatiale, on accède au domaine par une grille à code, silence et verdure, puis une allée bordée de chênes et de pins vénérables, conduit à une immense prairie qui descend vers la mer, éblouissante de lumières au sortir des arbres du parc. Je crois que c'est cet aperçu qui m'a frappée de bonheur au premier coup d’œil.

2003 parc 100_2292

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Ensuite, une porte secrète dont seuls les résidents ont la clé, conduit au sentier littoral par un étroit cheminement très sombre, voire inquiétant lorsque la nuit tombe, au clair de lune. Vite, la prairie et au loin les petites lumières de l'abbaye.

 

 

 

Mais suis je encore dans le sujet ? Je reviendrai à l'abbaye en fin d'article, en attendant le plus simple est de donner le lien avec son site, si ça vous tente.

 

http://www.abbaye-de-rhuys.fr/carte-presqu-ile-rhuys

 

Donc voilà, j'avais trouvé mon point de chute en cet été 1997, mille fois plus attirant que n'importe quel location saisonnière, car si on était libre de se balader seul, on pouvait aussi le faire en compagnie, et les repas se prenaient en commun.

 

J'ai eu donc toute latitude, pendant toutes ces années de celtitude, pour découvrir les charmes inouïs de cette presqu’île de Rhuys, sous le soleil de la Bretagne Sud, d'un coté ouverte sur l'Océan, et de l'autre fermant le golfe du Morbihan, ses cents îles, ses bateaux à voile orangé, ses traitres marées montantes et sa végétation exubérante.

 

Deux ou trois routes la desservent de bout en bout et chaque nervure conduit à tel ou tel minuscule petit port (St Jacques, Le Logeo ..) au bout du monde.

 

Des bourgs plus importants se succèdent tout autour de la presqu’île : Sarzeau, St Gildas, Arzon, Port Navalo, d'où l'on s'embarque pour l'ile d'Houat et Quiberon.

 

Un port créé récemment, Le Crouesty, apporte une des rares notes de « tourisme lambda », avec ses boutiques branchées, ses cafés, et ses quais bordés de hautes maisons façon Honfleur. Ici l'immobilier essaie de gagner du terrain, mais c'est vraiment une exception dans la presqu'ile, et d'ailleurs plutôt réussie.

 

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Le Château de Suscinio, redécouvert en ruines par Viollet le Duc qui en a sauvé ce qu'il a pu, a bénéficié d'une longue restauration, que j'ai pu suivre année par année, aujourd'hui, je la trouve presque trop « léché » et ce château fort entre océan et marais apparaît maintenant plus vrai que nature.

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2003 pavement

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Il n’empêche que chaque année je lui ai rendu visite, fascinée par ses dimensions, l'art de vivre qu'il suggérait, et son superbe pavement du 13ème siècle, découvert intact sous les ruines d'une chapelle incendiée, voisine du château et qu'on a reconstitué dans deux salles du château. Des animaux et des fleurs fantastiques sont esquissés sur fond de tomettes aux douces couleurs passées, rien que ce pavement mérite la visite !

 

Les soirs d'été, des opéras ou des pièces de théâtre sont données en plein air devant les douves, ainsi que des spectacles son et lumière.

 

 

 

Suscinio est le point de départ de la partie la plus singulière et sauvage de la presqu’île, qui devient de plus en plus étonnante au fur et à mesure qu'on y pénètre.

 

 

D'autres monuments en ponctuent les chemins : l'abbatiale de St Gildas déjà citée, le château de Kerlevenan que je n'ai jamais pu trouver ! Délicieux séjour du 18e siècle paraît il – et beaucoup plus loin dans le temps, la butte de César et surtout le grand Cairn du Petitmont, au dessus du port du Crouesty, face à l'océan.

 

 

La façade ouest de la Presqu’île déroule une succession d'anses et de longues plages de sable fin, bordées de pinèdes vigoureuses dont l'ombre est agréable après les heures de baignades ou de bronzette.

 

Kerver, le Fogéo, les Gohvelins, sont accessibles par de petites routes et les inévitables campings restent discrets et de bon aloi. On peut y arriver aussi par de nombreux sentiers piétonniers, qui sont très bien fléchés, et traversent des paysages de landes, de falaises, et de bosquets, avec toujours la vue sur le bleu de l'océan.

Un magnifique cheminement permet de passer derrière le chateau de Suscinio, en longeant l'océan et les marais et leurs petits habitants!

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Des promenades dont ne se lasse jamais, par exemple, depuis l'Abbaye, je prenais chaque soir après le diner trop précoce à mon gout, le chemin du Grand Mont, même s'il est parfois un peu accidenté.

 

Des escaliers sommaires, taillés dans la falaise, descendent jusqu'à la grotte où St Gildas, dit on, débarqua d'Irlande pour évangéliser la Bretagne.

 

 

Les gens venaient par la route du bourg, souvent, pour assister au coucher du soleil, qui en juillet, n'avait pas lieu avant 22 30, guettant le rayon vert, un spectacle d'une beauté surnaturelle, qui me manque au moment où je le décris, bien sur. Ajoutez le son, avec les mouettes, le ressac des vagues en contrebas, et le parfum marin, puissant et pur.

 

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Je repartais tranquillement par la route du village, j'aimais ce moment où à la nuit tombante, j'apercevais l'intimité des pièces éclairées des résidences secondaires, avec les oiseaux en bois derrière les fenêtres, et les rayonnage des bibliothèques. Et puis j'apercevais le clocher carré de St Gildas (ajouté au 17e siècle, curieusement, sur l'église romane) et je savais que j'étais bientôt arrivée dans le parc.

 

L'autre face de la presqu'île est très découpée, et un sentier tortueux permet de longer toute la côte qui donne sur le golfe. On peut facilement se garer près de Kerners, base d'une école de voile, et point de départ pour l'ile aux Moines, entre autres. Ensuite on peut faire à pied toute la cote jusqu'à Port Navalo, sans voir une seule voiture.

 

Des plages minuscules, des sentiers bordés de muriers dont les fruits sont déjà murs en août, des pinèdes, longent des propriétés familiales. Parfois un hameau de pêcheurs avec des vélos et des potées de plantes grasses contre les vieux murs, une ancienne fontaine … on oublie facilement qu'il faudra revenir à pied !

 

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En saison, se succèdent le soir des « fest noz » où les orchestres bretons font danser la population en rondes ou en couples (des cours de danses traditionnelles sont proposées gracieusement par les offices de tourisme), cidre, crêpes et galettes sont vendues pour un euro et on peut se régaler. (prix de 2009) – a la grande brocante de St Jacques en août, l'assiette d'huitres et son verre de vin blanc est à trois euros seulement.

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Pardons et messes en plein air sont organisés un peu partout dans les villages de la presqu'ile, ainsi que les visites de parc à huitres, les sorties ornithologique (réserve du Duers), initiation à la voile, et j'en passe.

 

Vannes, sa vieille ville et son port n'est qu'à 23 kilomètres.

 

Quiberon, Carnac, ne sont pas loin non plus

 

Si j'ai délaissé cette belle région, c'est que j'ai eu envie de voyager plus loin, mais aussi, à cause du règlement intérieur de cette incroyable abbaye, qui s'est durci au fil des années jusqu'à en devenir insupportable.

 

Il est certain que l'abbaye accueillait en majorité des personnes agées seules, parfois peu valides, mais aussi quelques couples (enfants et animaux non acceptés!) et des touristes un peu atypiques dans mon genre on va dire.

 

Il est certain qu'une année il y aurait eu une intrusion avec cambriolage en soirée.

 

Alors on a eu droit au couvre feu : dans chaque bâtiment, ceux qui sortaient le soir s'inscrivait sur un cahier dans le hall, et barrait leur nom au fur et à mesure qu'ils rentraient – Le dernier rentré avait donc pour mission de fermer la porte à clé.

 

Cet ingénieux système a été interdit, et tout le monde devait être rentré à 22h30, où une sœur circulait en fermant toutes les portes ! Les retardataires étaient bons pour dormir à la belle étoile ou oser déranger la sœur supérieure, souvent dans son bureau d'ailleurs, et s'exposer à une sévère réprimande ! Car on pouvait quand même entrer dans le domaine grace au code du portail.

 

Impossible donc de s'attarder à une fest noz, ou d'assister à un spectacle de Suscinio ! Cela ne dérangeait qu'une minorité, dont je faisais partie ..

 

Pire encore, exit le régime de la demi pension, bien pratique pour passer la journée dehors, on était condamné à rentrer pour 12h15,  alors qu'on n'avait même pas digéré le petit déjeuner ! Même payer le repas sans le prendre était interdit par la terrible sœur Annick ! Et que dire du prix alourdi, tout autant que .. la silhouette !

 

Cela devenait vraiment une maison de retraite et je n'ai pas supporté .. ni voulu aller ailleurs, le site était tellement envoutant que cela m'était impossible.

 

 

 

J'ai préféré, donc, m'abstenir et considérer que la période bretonne arrivait à sa fin ..

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Commentaires
B
Je te souhaite de renouer avec la Bretagne. ..belles photos bravo
C
Te voici de retour sur notre bon sol Français que tu nous fais découvrir avec beaucoup d'humour. Quant au radar.... n'en aies plus peur, c'est seulement au porte monnaie qu'ils font mal. Super article que je reviendrai voir d'ici peu. En attendant : bisooooo
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