Berlin, "so na, so fern" ..

Je ne respecte plus l'ordre chronologique, ayant commencé ce blog bien après le début de ces voyages, et finalement peu importe le temps, pourvu qu'on ai le lieu!

Je dirai seulement que ce voyage à Berlin s'est fait du 20 au 24 mai 2013.

Des lustres après la guerre qui l'a laissée en ruines, après la chute du mur qui l'a déchirée, Berlin est une ville encore en renaissance.

Tous les moyens sont bons, depuis la reconstruction à l'identique des anciens monuments ou quartiers, jusqu'aux innovations architecturales les plus folles.

 Et puis au milieu, il y a des zones curieusement vides, des esplanades, des pelouses, comme des trous de mémoire .. qu'y avait il là, avant ? qu'y aura t il, bientôt ?

 Pour cette itinéraire plutôt coté ouest (on parle encore ici, de l'est et de l'ouest), le départ est au Tiergarten, au pied de mon hôtel. L'ancienne réserve de chasse des princes électeurs a gardé son coté sauvage, avec ses sous bois, son lac, ses chemins forestiers, et ses lapins batifolant sur les pelouses!

de cette verdure émergent la fameuse Siegensaule, l'ange de la victoire cousin de notre génie de la Bastille, et le Carillon, le plus haut d'Europe (concert à midi).

Alentour, ce qu'on appelle le ruban fédéral aligne ses bâtiments administratifs au bord de la Spree, alliant romantisme et modernité. La Maison des Cultures du Monde (surnommé l'huitre enceinte!) offre expositions et restaurant au bord de l'eau.

 De nombreuses Ambassades dans les parages, toutes reconstruites, sauf, celle de Suisse, qui a gardé son coté vieillot d'avant guerre, protégée par sa neutralité ?

Tout cela nous amène devant le vénérable Reichstag, précédé d'une immense esplanade et surmonté depuis 1995 d'une étincelante coupole en verre : depuis sa rampe intérieure, on profite au sommet d'une splendide vue sur Berlin - visite gratuite mais sur réservation internet obligatoire - sur les terrasses, on est proche des statues 19ème légèrement noircies par l'incendie de 1933...

On repère déjà la porte du Brandebourg surmontée de son quadrige jadis confisqué par Napoléon.

Mais le coté touristique avec faux soldats et faux ours nous amènera plutot entre les 2711 stèles de béton gris amoncelées sur le vaste espace du Mémorial de l'Holocauste, entre lesquelles on peut se promener librement.

 Comme un peu partout dans Berlin, des sortes de colonnes Morris tapissées d'affiches en rouge et noir, à la mémoire de militants anti nazi de tous bords.

 

Cette histoire assumée force l'admiration, Berlin est à elle seule un livre d'histoire contemporaine tragique, le lieu névralgique des deux plus terribles tyrannies de l'humanité récente. Partout on ressent encore leur présence pesante, mais l'oubli était il une meilleure solution ?

Nous voici Postdamer Platz, dont le seul immeuble debout était en l945 l'hôtel de l'Esplanade ; sa façade de 1911 est maintenant enchâssée dans une structure de verre d'un étrange effet. Tout le reste a été créé à partir du néant, trois tours de verre géantes autour d'un atrium chapeauté d'une verrière conique, reliées par des cafés, un multiplex géant, et le superbe Musée du Cinéma allemand (photos interdites, mise en scène époustouflante ..) En cas de pluie, on peut continuer à siroter sa Berliner Weiss à la terrasse d'un des cafés, autour d'une fontaine, à l'abri du chapiteau.

Tout proche, le Forum de la culture réunit la Philarmonie de Berlin, la superbe Gemälde Galerie (photo autorisée) et ses deux Vermeer, et la Nouvelle Galerie Nationale. On est obligé de faire des choix, car il reste encore tous les autres, sur la bien nommée InselMuseum!

Avant de passer au chapitre suivant, allons nous restaurer d'une "currywurst" à l'un des nombreux kiosques "Imbiss" qu'on trouve un peu partout dans Berlin - j'avoue que là s'est arretée ma connaissance de la gastronomie berlinoise!

 

 La suite de l'itinéraire nous conduira dans l'ancien Berlin Est, direction le quartier de Prenzlauerberg, fief des familles "bobos écolos branchées" de la ville, avec ses avenues aux trottoirs défoncés, ombragées et bordées de petits restaurants ethniques.

 

On aimera particulièrement la Kollowitz platz et son marché bio, la KastanienAllée et ses arrières cours aux jardinets débordant de verdure et de cultures pédagogiques, de vélos avec leurs charettes à bébés! Un mot aussi de l'étonnant BierGarten, une brasserie géante en plein air dans un parc ensauvagé ..

 On y trouve encore des façades d'avant guerre, lépreuses et taggées, très cinéma, mais il semble que les rénovations aillent bon train, on le regrette presque .. ici à l'est seulement, il y a des tramways dans la grande tradition, jaune vif.

  L'ancien cimetière juif est un lieu plein de nostalgie, avec les tombes enfouies sous le lierre à l'ombre de grands arbres. Personne n'y fut enterré après 1939, d'après ce qu'on peut lire.

 

Plus au nord, c'est le MauerMuseum en plein air, autour de son fragment de mur de 200 mètres de long, dans un environnement dégagé et planté d'un champ de blé. Contrairement à son homologue du centre ville il est gratuit, avec des espaces abrités didactiques, et un belvédère surmontant un centre de documentation. Une chapelle du souvenir, en bois et circulaire, des chapiteaux d'une ancienne église, dans l'herbe, complètent le site de la Bernauer strasse.Il faut la descendre pour joindre le quartier de SchoenenViertel, qui se rapproche de la Spree.

 Cet ancien quartier juif encore très marqué "à l'Est", se distingue par le charme de ses arrières cours Art Nouveau, surtout les huit cours de l'Hackesche Hof, hélas un peu trop colonisées par le commerce de luxe, alors qu'à l'origine elles étaient plutôt populaires ! De même un marché de souvenirs s'est installé sous le métro aérien, vite, réfugions nous dans la verdure du Monbijou Park, ou à une des terrasses aménagées sur les bords de la Spree, avec vue sur Berliner Dom et l'ile aux Musées. Sous le soleil, la jeunesse s'étale sur les pelouses, l'autre rive nous attend..

J'aurais voulu évoquer la majestueuse perspective qui termine Unter Den Linden, depuis la statue équestre de Frédéric Le Grand, bordée de monuments et traversant la Spree jusqu'à l'Alexander Platz, elle aussi reconstruite "ex nihilo".Hélas, non seulement il pleuvait à verse ce jour là, mais toute l'avenue est bouchée par de gigantesques travaux pour le métro, grues, palissades et tunneliers formant l'essentiel du paysage!

 On croit alors toucher le fond, mais voici le refuge du lobby du Radisson Blue, et son aquarium géant suspendu, qui permettra de se sécher avant d'admirer la fontaine de Neptune sur fond de Tour de Télévision, avec à coté l'ancien Hotel de Ville en briques rouges, et - autre refuge - l'adorable Marienkirche et son décor baroque. Oui, l'Alex, comme on l'appelle ici, est faite de toutes les époques et tous les styles, et il faut y ajouter l''Ost Bahn, des centres commerciaux redondants, des espaces vides, et dans un coin, le petit havre de paix du quartier St Nicolas, restauré à l'identique façon médiévale, autour de son église à double clocher.

 

Un autre jour, bien plus au sud, voici le quartier de Kreuzberg que je remonterai jusqu'à la Postdamer Platz.

 Le magnifique Musée du Judaisme (2001) en forme d'étoile de David éclatée, expose dans une ambiance gris foncé la place du judaisme en Allemagne, des origines à l'Holocauste. Passionnante mise en scène avec bornes interactives et jardins symboliques.

 Plus haut sur la Friedrich Strasse, les galeries commerciales inventées par Jean Nouvel (les Galeries Lafayette) et Ming Pei (rappel de l'art déco) qui longent la Gendarmen Markt et ses deux églises.

 Et voici enfin le Check Point Charlie, reconstitué pour les visiteurs avec de faux militaires dans leur guérite, et de nombreux panneaux retraçant l'histoire du Mur.

  Tout près, sur les ruines du siège de la Gestapo, voici la "Topographie des Terreurs", un autre musée en plein air, adossé à un autre fragment du mur. En face, le ministère de l'air du IIIème Reich, austère et sinistre, rescapé des bombardements, fait décor à ce lieu de mémoire.

 

Il faut laisser Berlin, toujours inachevée, après un concert live de rock allemand sur le Kud'am, sans avoir vraiment vu les deux églises du Souvenir, cachées dans un carcan de buildings. Seuls leurs clocher en émergent : l'un surmonté d'une croix, l'autre en forme de "dent creuse" qu'on a voulu laisser tel que les bombes l'ont façonné.

C'est là que nichaient les anges des "Ailes du Désir", le beau film de Wim Wenders: depuis cette époque (1984) Berlin a bien changé!

Pour connaitre mieux ce Berlin du Mur, je vous suggère la lecture du beau roman de Douglas Kennedu "Cet instant là" dont l'action se passe, justement dans cette ville déchirée des années 80.